lundi 6 avril 2015

Erni


Le printemps est arrivé et Hans Erni est parti. Le peintre et plasticien lucernois était âgé de 106 ans. Il venait de fêter son anniversaire en février. Encore en bonne forme, il dessinait tous les jours dans son atelier.



Hans Erni est né le 21 février 1909 à Lucerne. Il disposait de son propre musée, sur le site du Musée des transports. Il a réalisé des peintures murales, des tapisseries, des reliefs, des mosaïques, des sculptures, des céramiques, des médailles, de nombreux timbres, des centaines d'affiches et des illustrations pour des livres.


L'artiste est surtout connu pour ses œuvres figuratives, telles que des chevaux, des nus et des colombes pour la paix. Il a travaillé notamment pour la Confédération, la Croix-Rouge ou l'industrie chimique bâloise.

Affiche pour une tournée du cirque national suisse
Il entre en apprentissage dans un bureau de topographie puis travaille durant sa jeunesse comme dessinateur en bâtiment chez un architecte. En 1927, il rejoint l'école d'art de Lucerne. Dès 1928, il monte à Paris étudier à l'Académie Julian qui lui attribue un prix. Un an plus tard, il part pour Berlin et d'autres villes d'Europe. Il y rencontre Kandinsky, Mondrian et bien d'autres. Ses influences sont clairement cubistes au travers de Braque et Picasso. 

Nu féminin assis Sitzender weiblicher Akt Huile sur toile 1928
Inscription en bas, à droite: HANS ERNI Académie Julian
À la fin des années 1930, il fait plusieurs voyages à Londres où il découvre les mouvements abstraits. De 1930 à 1934, il travaille sous le pseudonyme de François Grèque. Il  rencontre et devient ami notamment de Henry Moore et les émigrés allemands membres du Bauhaus. 


Ce n'est qu'après la guerre que son génie éclate avec de nombreuses peintures et expositions. Erni travaille dans plusieurs ateliers disséminés en Europe. Il devient célèbre par la réalisation d'une fresque pour l'Exposition nationale suisse de 1939 à Zurich.

En 1949, il se voit retirer la commande des nouveaux billets de banque suisses. Il avait gagné le concours à la veille de la guerre, en 1939, l’année de ses 30 ans, et représenté une Suisse paysanne, mais aussi ingénieuse, savante.Cet ostracisme, qui lui vaudra bien des décennies plus tard des excuses officielles, lui coûte aussi sa participation à la Biennale de São Paulo en 1951. Cela ne l’empêche pas de continuer à exposer, y compris aux Etats-Unis pourtant prompts à bannir ceux sur qui plane le soupçon de communisme. 


Erni est aussi à l'origine de nombreux timbres. En 1979, le musée portant son nom s'ouvre à Lucerne. En 1989, Erni reçoit un prix pour ses œuvres dans le domaine sportif de la part du United States Sports Academy


En 1992, Erni réalise le portrait du Secrétaire Général de l'ONU, Javier Pérez de Cuéllar, qui est affiché dans le bâtiment de l'ONU à New York. L'ONU a, en quelque sorte, joué le rôle de mécène puisque de nombreuses œuvres d'Erni ont été mandatées par l'organisation. 

Erni est un peintre très populaire en Suisse. La science, l'histoire et la mythologie sont des thèmes récurrents, ses peintures mettent en scène le contraste entre l'Antiquité, le monde contemporain et les civilisations. De nombreuses expositions lui ont été consacrées, en Suisse ou en Europe.

Il existe des liens entre l'artiste lucernois et Neuchâtel où il a laissé plusieurs œuvres marquantes au Musée d'ethnographie (MEN). Mais il aura aussi laissé son souvenir inspiré à La Chaux-de-Fonds, dont le Musée international d'horlogerie abrite le triptyque intitulé "La conquête du temps", élaboré à l'origine pour l'Exposition universelle de Bruxelles de 1958.

La salle Hans Erni du Musée International de l'Horlogerie
de La Chaux-de-Fonds
Le Musée d'Ethnographie de Neuchâtel a la chance de posséder
"Les conquêtes de l'homme", gigantesque fresque de 27 m sur 7 m
Ich denke – Ich Liebe III – 1988
L'hommage d'Alain Berset : " Hans Erni était une personnalité intelligente et attachante, qui vivait par et pour son art ", a réagi le ministre de la culture Alain Berset, estimant que " la Suisse a perdu une figure artistique majeure, qui a traversé le 20e siècle et côtoyé les plus grands artistes." 
" J'ai eu l'occasion de rencontrer Hans Erni et son épouse Doris chez eux à Lucerne, en 2013. Ce fut une rencontre émouvante ", se rappelle le conseiller fédéral. "Nous avions notamment échangé autour de la force du mouvement, dans son art, puis dans la politique et dans la vie en général. C'est parce que tout se transforme, c'est parce que tout change qu'il n'y a de stabilité que dans le mouvement. "

Taube begegnet Pegasus – 2005
Archives vidéo de la rts
Erni à travers les archives du Journal de Genève et de la Gazette de Lausanne 

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