D'abord j'avais pensé à un titre plus accrocheur, parce que j'avais en tête "Qui a tué Virginia Woolf?" Or, après vérification, ça aurait été "Qui a peur de...?" et ça ne m'allait pas. Pas plus que ceux et celles qu'on a tués : Pamela Rose, Harry, Ben Laden ou Kennedy. Non, je m'éloignais beaucoup trop de mon sujet : Esther Montandon !
On est parfois entraîné dans des histoires loufoques bien malgré nous. C'est ce qui m'est arrivé quand je suis entrée dans la vie d'Esther ou elle dans la mienne. Mieux, je lui ai prêté ma voix. C'est pas rien ça, surtout quand il a fallu toutes ces années pour que je m'accoutume au son de la mienne, à mon accent traînant et à mon style familier et spontané. Et voilà qu'en août dernier, on me demande ma voix parce qu'elle pourrait coller au personnage. C'était tout faux, mais je la lui ai prêtée quand même puisqu'il s'agissait d'un jeu. Esther était tout ce que je ne suis pas. Un vrai rôle de composition...
Esther Montandon, c'est cette auteure suisse née le 8 mai 1923 à La Chaux-de-Fonds et morte le 30 novembre 1998 à Yens. C'est elle, née Esther Jeanneret de l'union de Basile et Clara Jeanneret, épouse de Jacques Montandon dès 1946. Et surtout, elle qui a écrit Le Piano dans le noir et Les Imperdables
et qui a reçu la Bourse C.-F. Ramuz 1972 pour Trois grands singes.
On y est ?
Y est-on vraiment ? En août 2013 paraît aux Éditions d'autre part un inédit posthume d'Esther Montandon : Vivre près des Tilleuls. Et quelques semaines plus tard, le 10 octobre, coup de théâtre :
Un canular littéraire en Suisse romande : l’inédit posthume d’Esther Montandon est l’œuvre de l’AJAR
En référence aux informations publiées par La Semaine dans son édition du 10 octobre 2013, l’Association Esther Montandon, en charge de la postérité de l’auteure chaux-de-fonnière, et l’AJAR (Association des jeunes auteurs romands), collectif d’écriture fondé en janvier 2012, confirment avoir monté un canular littéraire avec la publication de Vivre près des tilleuls, texte présenté comme un inédit posthume de l’écrivaine.
Vivre près des tilleuls avait prétendument été écrit au début des années 1960, période marquée par le décès de Louise, la fille d’Esther et Jacques Montandon, à l’âge de 4 ans, le 3 avril 1960. Dans un geste désespéré, l’auteure avait alors brûlé tous ses textes en cours. En août 2013, la publication, aux Editions d’autre part, d’un inédit relatant ces événements a fait sensation dans le milieu littéraire romand, aucun autre texte de l’époque n’ayant survécu.
Ce canular n'a pas suffi aux chenapans de l'AJAR. Il a fallu qu'ils l'exportent au Québec. C'est pour ce voyage que ma voix est entrée en scène. Jusqu'à ce moment-là, Esther avait un visage, mais pas de voix. J'ai dit oui, puis j'ai pris peur, je ne suis pas actrice. Mais j'ai l'accent... J'ai joué le jeu, je me suis prise au jeu. Pendant les quelque 2 heures de l'entretien, j'ai été Esther.
Au Québec, coup de théâtre !
Un canular dans le canular
Comment présenter une édition Doubles et pseudos sans céder à la tentation d’incorporer un canular à notre programmation? Nous n’avons évidemment pas pu résister et nous avons laissé le champ libre à l’AJAR – Association des jeunes auteurs romands, qui a réussi à berner les festivalières et les festivaliers de Québec en toutes lettres avec son exposition Autopsie d'un canular. Hier soir, le spectacle Esther Montandon : pièces détachées révélait le pot aux roses.Vous pensiez que ces jeunes littéraires avaient trompé le milieu littéraire romand en faisant publier un faux inédit posthume sous la plume de l’écrivaine Esther Montandon ? Détrompez-vous… Esther Montandon n’a jamais existé! Hé oui, sa vie, ses œuvres, ses photographies, les objets lui ayant appartenu : tous faux. (http://www.quebecentouteslettres.com/)
J'ai reçu un compte-rendu de la performance de l'AJAR : "Nous avons passé deux semaines superbes au Québec. Notre canular a eu
un succès fou, les gens sont tombés en amour avec Esther Montandon et
ont été très surpris (et parfois ravis, parfois vexés, parfois fâchés)
du dénouement. Nous avons été bien entourés par l'équipe du festival
qui nous a permis de monter une expo très pro dans la galerie P, un
endroit culturel sympa proche du vieux Québec. Après une semaine d'expo
libre, nous avons donné une lecture "hommage" qui a progressivement
dégénérée en lecture-vandalisme puisque nous avons commencé à changer
la biographie d'Esther à grands coups de stylos indélébiles et à
détruire ses livres et ses objets devant le public. Nous étions très
contents du résultat de cette lecture."
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