Dans beaucoup de pays l'université est perçue comme la seule
voie d'accès au marché du travail. On pense que l'apprentissage se limite
aux professions manuelles, comme électricien ou charpentier, alors que les jeunes peuvent aussi se former de cette façon au métier d'informaticien
ou d'ingénieur.
Dans certains pays, comme au Royaume-Uni, il n'en a pas toujours été ainsi. Il y avait une
tradition de formation duale jusque dans les années
1980, mais le gouvernement de Margaret Thatcher l'a largement démantelé,
estimant qu'un Etat libéral n'avait pas à prendre en charge la
formation des jeunes. Cette évolution a été encore
accentuée par la stratégie du New Labour, arrivé au pouvoir en 1997,
d'amener 50% des adolescents britanniques à l'université. Par comparaison, en Suisse, près de 14% de la population de référence a obtenu un diplôme
d’une HEU (haute école universitaire). Les taux de diplôme HEU varient considérablement
d’un canton à l’autre. Le canton de Genève a le taux de
diplôme le plus élevé avec 18,7%. En revanche, le canton d'Obwald
affiche le taux le plus bas, avec 6,4% de diplômés HEU.
(http://www.bfs.admin.ch/bfs/portal/fr/index/themen/15/06/dos/blank/05/04.html) |
En Suisse, on peut être à la tête de grandes entreprises connues dans le monde
entier en ayant acquis une formation professionnelle. Cette formation
professionnelle qui permet à la Suisse de disposer d’une main-d’œuvre
hautement qualifiée et innovante porte le nom pas très sexy de duale.
Deux jeunes sur trois la choisissent. Un succès qui, selon
le Secrétariat d’État à la formation, à la recherche et à l’innovation
(SEFRI), est dû aux nombreux débouchés professionnels que le système de
formation duale suisse offre et à la formation complète (théorique et
pratique) qu’elle assure. En effet, les élèves n’acquièrent pas
uniquement des capacités et des connaissances théoriques mais apprennent
immédiatement à assumer des responsabilités : dans l’entreprise ils
assimilent les bases pratiques, participent au processus de production
de l’entreprise, découvrent la vie quotidienne d’une entreprise et
reçoivent un salaire. Ils apprennent ainsi rapidement les ficelles du
monde du travail.
C'est un point de départ; à chacun la
possibilité de modeler son chemin. Après celle-ci, il est possible de
suivre une formation professionnelle supérieure permettant l’acquisition
de compétences professionnelles spécifiques et préparant à des postes
de direction. La grande perméabilité du système
formatif suisse permet d’approfondir ses connaissances de base,
d’apprendre de nouvelles connaissances techniques, de changer
d’orientation professionnelle, d’accéder à l’université ou à une école
supérieure spécialisée grâce à des formations "passerelles". Personne ne dit que c'est facile, mais c'est possible.
Le modèle d'apprentissage suisse devient exportable. Un projet-pilote, lancé en 2008, a permis d'introduire le système de formation duale en Inde, d'abord auprès de quelques entreprises de l'industrie des machines. Le but était de faire tache d'huile. Le gouvernement indien s'est engagé à former 526 millions d'apprentis d'ici à 2020.
Confrontés à un fort chômage des jeunes, d'autres pays sont
intéressés par le modèle.
Ces dernières années, des délégations en provenance de
Chine, d'Indonésie, d'Inde ou d'Afrique sont venues en Suisse . Genève a également mis sur pied un projet de promotion du modèle
dual au Cameroun. En Afrique du Sud, la Suisse a développé des formations duales de deux ou quatre ans dans les professions techniques (électricien, soudeur, tourneur). En ce qui concerne la Chine, je demande à voir. En effet, pour ceux qui peuvent offrir un vrai métier à leur chère tête noire, il n'y a que l'université qui compte, on est prêt à tous les sacrifices pour un diplôme académique. Peut-être que le gouvernement de Beijing pourra utiliser sa force de persuasion légendaire...
Ce n'est donc pas les pays étrangers qu'il faut convaincre, mais plutôt les multinationales installées en Suisse. " Une enquête menée par la Neue Luzerner Zeitung en Suisse
alémanique révèle que les multinationales ne forment pas assez
d'apprentis, citant par exemple Glencore qui compte 760 employés et pas
un seul apprenti. Dans les faits, la plupart des multinationales ne
connaissent pas bien le système de formation duale suisse et donc ne
forment pas suffisamment d'apprentis. Le constat est toutefois plus
nuancé en Suisse romande. Comment inciter les multinationales à
favoriser les apprentissages?" (http://www.rts.ch/la-1ere/programmes/forum/6252832-forum-du-03-11-2014.html) Et encore, il faut savoir s'il s'agit de multinationales suisses ou de groupes étrangers, les premières étant habituées au système. Pour les autres, c'est plus compliqué : il faut comprendre le système, puis mettre en place un moyen de coacher les apprentis selon un protocole strict. En plus, les apprentis doivent savoir l'anglais pour un apprentissage bilingue. Du coup, comme c'est compliqué, on pourrait préférer des stagiaires qui auraient reçu leur formation de base par d'autres.
D'habitude, je n'ai rien contre la mondialisation, mais là elle m'irrite. C'est vrai, ça, on ne peut pas que récolter, il faut aussi semer...
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