Après "La Forteresse" et "Vol spécial", Fernand Melgar est revenu cet été à Locarno pour présenter "L'Abri".
Fernand Melgar, à la radio, à la télé, en live à Locarno, sonne vrai, sincère, concerné. Dans ses films, sa caméra observe les
situations, de manière aussi neutre que possible - mais peut-on avoir un
regard vraiment neutre? est-ce que les protagonistes peuvent, eux,
oublier l’œil de la caméra? - gros plans sur des visages perdus, fâchés
ou soulagés.
Il ne lâche pas, Fernand Melgar. Dans "La Forteresse",
il a filmé des femmes, des hommes et des enfants, Roms, Togolais,
Géorgiens, Kosovars ou Colombiens, qui affluent aux portes de la Suisse,
ayant fui la guerre, la dictature, les persécutions ou les
déséquilibres climatiques et économiques et qui sont dirigés vers l’un
des cinq Centres d’enregistrement et de procédure. Dans un lieu de
transit austère, soumis à un régime de semi-détention et à une oisiveté
forcée, les requérants attendent que la Confédération décide de leur
sort. Il a filmé les hommes et les femmes, d’origines diverses eux
aussi, qui gèrent l’accueil des requérants et leur séjour.
Avec "Vol spécial",
il est allé à la rencontre des hommes, ceux qui doivent partir, ceux
qui les gardent et ceux qui les emmènent. Un film qui a mis mal à l’aise
cette Suisse qui a voté à une immense majorité les mesures de
contraintes et la possibilité de détenir jusqu’à 24 mois, ceux qui
refusent de partir. Un film qui a fait exploser certains, qualifiant de
fasciste l’approche de Fernand Melgar.
Il ne s'est pas
laissé démonter, il a remis son ouvrage sur le métier, il a abordé un
autre aspect du problème dans ce troisième volet, "L'Abri" qui se résume ainsi : "Un hiver au cœur d’un hébergement d’urgence pour sans-abris à Lausanne. À
la porte de ce souterrain méconnu se déroule chaque soir le même rituel
d’entrée dramatique qui donne lieu à des bousculades parfois violentes.
Les veilleurs ont la lourde tâche de « trier les pauvres »: femmes et
enfants d’abord, hommes ensuite. Alors que la capacité totale de l’abri
est de 100 places, seuls 50 « élus » seront admis à l’intérieur et
auront droit à un repas chaud et un lit. Les autres savent que la nuit
va être longue."
J'ai utilisé "La Forteresse" dans certains de mes cours quand il est sorti, je n'ai pas vu "Vol spécial", il y aura du rattrapage à faire. J'ai été touchée et mal à l'aise - comment ne pas l'être - en regardant "L'Abri". Qu'avons-nous à proposer alors que la planète ne cesse de gronder et que l'hiver approche à nouveau ? Est-ce normal que dans ce pays où, peu avant la projection de Locarno, la Banque nationale suisse a annoncé un bénéfice de 16.1 milliards de francs au 1er semestre 2014, on ne trouve pas de solution pour aider les moins nantis? OK, je sais que dans mon pays, les étrangers n'ont pas la cote, que tous les maux nous viennent d'eux. De quels maux parle-t-on au juste ? Et allez, le .1 milliard pourrait déjà arranger l'affaire, à défaut de tout régler !
Laissons le dernier mot à Fernand Melgar :
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire